L’arrivée tardive d’arbitrages sur le Diagnostic de Performance Énergétique a posé d’immenses difficultés sur la cohérence des logiciels de calcul et les phases de tests à réaliser. Résultat : des DPE aujourd’hui parfaitement conformes sur le plan réglementaire, mais parfois contestables sur le plan énergétique.
Le communiqué de presse recommandant de suspendre l’édition des DPE des logements construits avant 1975 offre une possibilité de corriger certains calculs du DPE de manière raisonnable, satisfaisante pour les propriétaires, et respectueuse du travail des diagnostiqueurs immobiliers.
Arrivée tardive d’arbitrages sur le DPE
Depuis le 1er juillet dernier, une réforme nécessaire et bénéfique pour la lutte contre le réchauffement climatique concernant le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) a été mise en œuvre.
Comme nous l’a rappelé le dernier rapport du GIEC paru en août, certaines décisions, certains travaux ne peuvent plus être retardés. Cette urgence valide l’agenda politique du nouveau DPE, soutenu par Diagamter et la Chambre des Diagnostiqueurs Immobiliers de la Fédération Nationale de l’Immobilier (CDI FNAIM), conscients de la situation.
Cependant, depuis l’automne 2020, nous avons constaté l’arrivée tardive d’arbitrages sur le DPE, ce qui allait poser d’immenses difficultés sur la cohérence des logiciels de calcul et les phases de tests à réaliser.
Parce que nous sommes responsables et au service de nos clients, nous avons engagé tous nos collaborateurs sur la mise en œuvre technique de cet agenda politique.
12% des biens immobiliers classés en G et 13,5% en F aujourd’hui
Force est de constater qu’après 3 mois, les outils méthodologiques qui nous sont imposés par le Ministère du Logement, et mis en œuvre dans les logiciels, génèrent parfois des étiquettes indûment majorées. Nous remettons donc à nos clients des DPE parfaitement conformes sur le plan réglementaire, mais parfois contestables sur le plan énergétique.
Les biens classés F et G sont très nombreux, ce qui conduirait à terme à qualifier de passoires énergétiques beaucoup plus de biens immobiliers que ce que la politique de rénovation de l’État prévoit. Une preuve évidente : sur un échantillon Diagamter de 150 000 DPE version 2 (avant la réforme), 4% des biens immobiliers étaient classés en G et 12% en F pour l’étiquette énergétique.
Aujourd’hui, avec la dernière version du DPE (version 3), sur un échantillon Diagamter de 6 000 DPE réalisés sur la France entière de juillet à septembre 2021, 12% des biens immobiliers sont classés en G et 13,5% en F.
Demain, les étiquettes énergétiques F et G conduiront à des interdictions de location et des obligations d’audit énergétique. Il est par ailleurs probable qu’une hausse sensible soit constatée sur les biens immobiliers étiquetés D et E.
Fenêtre d’opportunité, suite au communiqué de presse de la Ministre
Il n’est plus possible de poursuivre la réforme sans apporter des modifications à sa trajectoire. Le communiqué de presse du 24 septembre 2021 de Madame Emmanuelle Wargon, Ministre déléguée auprès de la Ministre de la Transition écologique, chargée du Logement, recommandant de suspendre l’édition des DPE des logements construits avant 1975, crée une fenêtre d’opportunité.
Cette fenêtre offre une possibilité de corriger certains calculs du DPE de manière raisonnable, satisfaisante pour les propriétaires, et respectueuse du travail des diagnostiqueurs immobiliers. Ces derniers sont trop souvent mis en cause, alors que nous ne faisons qu’appliquer une réglementation qui leur est imposée.
Précisons que Diagamter, comme les principaux acteurs du marché, continuera à fournir des DPE à ses clients, des propriétaires qui se trouvent dans une situation d’urgence pour l’extrême majorité d’entre eux.
Fournir des DPE conformes réglementairement et techniquement
Une réunion de concertation est prévue le 4 octobre entre le Ministère et les professionnels de l’immobilier et du diagnostic. Ce rendez-vous doit déboucher sur un scénario réaliste, permettant à terme de fournir des DPE conformes réglementairement et techniquement, et qui fassent à nouveau la fierté des diagnostiqueurs. Pour parvenir à ce résultat, deux éléments très simples sont à prendre en considération.
D’une part, le délai. J’ai passé 20 ans de ma vie professionnelle dans la gestion de grands projets et l’intégration de systèmes informatiques. J’ai acquis la conviction qu’il faudra au moins 3 mois pour corriger, tester, éprouver, fiabiliser les outils méthodologiques dont nous disposons fin septembre.
Tout délai plus court, pour se faire plaisir, nous expose au risque important de devoir utiliser des nouvelles versions du logiciel qui ne seraient toujours pas au point, désenchanteraient nos clients, les professionnels de l’immobilier, les diagnostiqueurs, et mettraient à mal la réforme politique portée par le gouvernement, dont je rappelle pour ma part le bien fondé.
De ce point de vue, les intérêts du Ministère, des professionnels de l’immobilier et des diagnostiqueurs sont donc liés. Il faudra donc un peu de temps pour faire mûrir ce DPE.
Considérer l’intérêt des propriétaires
Second élément à prendre en considération : l’intérêt des propriétaires auxquels nous aurons fourni des DPE réglementairement exacts mais techniquement contestables tout au long du 2e semestre 2021.
Dès que la méthodologie sera stabilisée, il faudra bien sûr leur fournir, sans frais pour eux, un DPE actualisé de leur bien.
Le diagnostiqueur n’a évidemment pas vocation et ne peut pas financièrement supporter le coût de ce travail supplémentaire, qui lui sera demandé. C’est bien l’État, qui a apporté sa garantie aux diagnostiqueurs pour la réforme au 1er juillet, qui n’a pas pu nous fournir des outils fiabilisés à temps, et qui doit en supporter les conséquences financières.
Nous estimons, chez Diagamter, que le coût de cette prise en charge devra être de 50% du montant initial de la prestation, soit une centaine d’euros en moyenne.
Un coût pour les diagnostiqueurs immobiliers
Ce travail sera fastidieux pour les diagnostiqueurs, en surcroît d’activité sur une période où nous recherchons, comme beaucoup d’entreprises des compétences et de la main d’œuvre. Il ne peut donc pas être fait à titre gracieux.
Ce prix est justifié, car il exigera un dialogue au cas par cas avec chaque propriétaire. Peut-être faudra-t-il injecter de nouvelles données pour fiabiliser le DPE. À coup sûr, il faudra émettre de nouvelles recommandations, car les étiquettes auront changé, les expliquer au propriétaire et supporter la charge administrative du recouvrement auprès de l’État.
C’est la position que je soutiens au sein de la CDI-FNAIM et je crois savoir qu’elle est partagée par bon nombre de confrères dirigeants d’entreprises ou de réseaux dans le diagnostic immobilier.
Ce sera, je l’espère, la position officielle de la CDI FNAIM à laquelle nous sommes très attachés, et dont nous soutenons constamment la politique générale et la manière de discuter avec les autorités.
Sortir par le haut d’une situation aujourd’hui inconfortable
C’est bien dans le calme, la compréhension des contraintes des politiques, de l’administration, et aussi la défense de nos intérêts que des solutions acceptables par tous peuvent émerger. Pour cette même raison, nous avions gardé le silence depuis des mois.
Nous sommes à un moment d’articulation, et il me semble important de nous exprimer, tant vis-à-vis des fédérations, du Ministère, de nos cabinets, de leurs collaborateurs et surtout de nos clients, les propriétaires.
Ce scénario est, je le répète, réaliste, raisonnable et permet à tout un chacun de sortir par le haut d’une situation aujourd’hui inconfortable. C’est notre responsabilité de dirigeant de contribuer chaque jour à faire émerger ces solutions. C’est le sens de mon attachement et de mon implication au sein de la CDI FNAIM et de l’action de son président, Thierry Marchand.
Guillaume Exbrayat, président de Diagamter