Dans un référé rendu public le 28 octobre 2022, la Cour des comptes dresse un constat au vitriol du dispositif de rénovation énergétique des bâtiments. En réponse, le Gouvernement promet de rectifier le tir... en s'appuyant notamment sur le DPE.
2021 : 7 milliards d’euros d’aides mais seulement 750000 financements débloqués auprès de l’ANAH (3/4 des actions consistant en un changement du mode de chauffage), 50000 rénovations globales réalisées, 5000 seulement pour des maisons individuelles. Autant dire que pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050, le compte n’y est pas ! Ce qui n’a pas échappé à la Cour des comptes mais pas seulement.
« Il manque à la politique de rénovation énergétique des bâtiments un pilotage fort et efficace et un service public de l'accompagnement efficient sur l'ensemble du territoire national »
La Cour des comptes pointe du doigt les réformes fréquentes qui nuisent à la lisibilité : « d’une part, les dispositifs ne couvrent pas toujours les mêmes gestes, s’agissant notamment du taux réduit de TVA pour les travaux de rénovation relativement aux subventions directes. D’autre part, les règles de cumul ont évolué et ne sont ni stabilisées, ni aisément compréhensibles pour les usagers ». La notion même de rénovation est jugée « imprécise ». Malgré la création de la plateforme France Rénov’, les rôles et les missions des différentes structures n’est pas suffisament claire pour les particuliers, le dispositif s’apparentant plus à un simple « annuaire ». A cela s’ajoute des « incohérences » entre administrations.
Autre frein mis à l’index : l’impact des travaux de rénovation énergétique réalisés est jugé insuffisant et ne prend pas suffisamment en compte l’empreinte environnementale de tels chantiers. Les données manquent pour analyser l’efficacité des aides attribuées, conçues à partir d’un objectif de massification : « la définition des cibles comme la mesure des résultats s’expriment le plus souvent par le nombre de logements rénovés et les dépenses publiques consenties, plutôt que par les quantités d’énergie économisées et d’émissions de gaz à effet de serre évitées ».
La Cour des comptes formule une série de recommandations
Pour lever les différents freins pointés du doigt, la Cour des comptes alerte sur « la nécessité de rationaliser rapidement la définition des objectifs, les moyens mobilisés et le suivi des résultats afin de pouvoir mesurer la performance effective des investissements réalisés ». Plusieurs recommandations sont faites :
- Estimer précisémment les engagements financiers et les bénéfices attendus
- Préciser et simplifier les règles de cumul des dispositifs
- Fiabiliser et rendre disponible les données pour mesurer l’efficacité des dispositifs
- Améliorer et renforcer le pilotage national
En réponse, le Gouvernement promet de se conformer aux recommandations et mise notamment sur le DPE pour mesurer l’impact des rénovations énergétiques
Dans sa réponse écrite, la première ministre Élisabeth Borne met en avant le virage effectué en début d’année avec le lancement de la plate-forme en ligne France Rénov'. Elle promet également un « parcours simplifié » pour fin 2022 permettant de « coupler le bénéfice de MaPrimeRénov' et l'éco-prêt à taux zéro ». De quoi « aboutir en 2024 sur un système encore plus simple, plus lisible, et qui incite davantage à la réalisation de rénovations énergétiques performantes et globales ».
Point important côté diagnostics immobiliers, le DPE mouture 2021 devrait permettre de mesurer l’impact des rénovations : « l'intégration de cette donnée dans la mesure de l'efficience des aides sera engagée dès 2023. Sa prise en compte dans le calcul des aides est aussi une piste envisagée par le gouvernement pour mieux cibler les logements les plus énergivores et encourager les rénovations plus ambitieuses ».
Le réseau Diagamter milite depuis 2006 pour une montée en puissance du DPE dans la politique d’aide et de déclenchement de travaux de rénovation énergétique du parc immobilier. Chaque année, ce sont 70 à 80000 DPE qui sont réalisés au sein de notre réseau, nous parlons donc à la lumière de notre expérience. Après une réforme difficile du DPE en 2021, force est de constater que ce diagnostic concerne principalement les biens mis en vente ou en location. Pour une politique massive de réduction de l’empreinte carbone du bâtiment, nous soutenons avec SIDIANE, notre fédération professionnelle, l’extension de la réglementation du DPE à la totalité du parc immobilier français hors contexte de vente ou de location. De quoi doper le faible volume de rénovation des maisons individuelles en 2021, noté à juste titre par la Cour des comptes.