Carnet numérique du logement, futur du DPE, lutte contre l’habitat indigne, réforme de l’amiante, qualité de l’air d’un local, analyse thermique du bien, chantiers de l’institution pour 2019… Thierry Marchand, président de la CDI FNAIM, revient sur les récents acquis et les évolutions à anticiper concernant le métier de diagnostiqueur immobilier, dont le rôle demeure d’établir un véritable état des lieux du logement.
Evaluer les risques, informer de de la situation sanitaire, auditer ou expertiser le cas échéant le confort et l’accessibilité… l’intervention de ce professionnel concourt à permettre une meilleure qualité de vie dans l’habitat.
Quelles seront les principales conséquences des évolutions réglementaires actées en 2018 (telles que la loi Elan) pour les vendeurs, acquéreurs, locataires et bailleurs de biens immobiliers ?
Le contrôle sur les diagnostiqueurs immobiliers a été encore accentué. Depuis le 1er janvier 2019, il s’applique désormais aux organismes de formation. La durée de la validité de la certification des opérateurs est étendue de 5 à 7 ans.
Un carnet numérique du logement sera désormais obligatoire[1] et tenu régulièrement à jour pendant la vie du bien. Ses accès en ligne seront transmis à l’acquéreur par le notaire lors de sa vente.
A l’instar du carnet d’entretien pour un véhicule, il centralise l’ensemble des données d’un bien immobilier dans le but d’en constituer le mode d’emploi : manuel d’utilisation de la ventilation, entretien de la chaudière, manipulation des panneaux solaires, détails des travaux effectués…
Il offre à l’acquéreur de mieux choisir son futur bien en connaissant son historique et ainsi, par exemple, d’en améliorer les performances environnementales et énergétiques. Seul bémol : si les données des diagnostiqueurs immobiliers vont alimenter bien évidemment ce carnet numérique, elles devront être préservées de tout usage commercial par des intérêts privés. Le décret d’application se devra de rendre le carnet numérique viable et fiable.
D’autres nouveautés générées par la Loi Elan ?
Dans la réalisation du nouveau Diagnostic de Performance Énergétique (DPE), la loi Élan a intégré les huit points majeurs mis en exergue pour les pouvoirs publics par la CDI FNAIM ont été repris. Le législateur a souhaité rendre le DPE opposable dès le 1er janvier 2021, comme l’ensemble des autres diagnostics immobiliers.
Des modifications seront apportées sur les données servant de calcul au dispositif afin de rendre le DPE plus fiable et plus lisible pour les consommateurs. Exemples : un modèle unique de calcul, la suppression des DPE vierges, la mesure des surfaces chauffées ou refroidies, ou encore intégrer les nouveaux matériaux d’isolation actuels ainsi que les nouveaux systèmes de production de chaleur plus efficaces et moins consommateur d’énergie.
Reconsidérer le DPE, créé en 2006 et modifié en 2012, était devenu inévitable. Une nouvelle toilette s’imposait pour mieux intégrer les enjeux environnementaux notamment pour les logements. Depuis ces 7 dernières années, les évolutions technologiques dans la construction ont en effet été considérables.
Jusqu’à présent, le DPE s’est déjà avéré un formidable outil de sensibilisation à la performance énergétique du logement. Avec cette nouvelle adaptation, il deviendra plus adapté aux attentes du particulier, en devenant un véritable thermomètre de la performance du bien. Le propriétaire pourra encore mieux évaluer les travaux à réaliser.
Enfin, la loi Élan permet aussi de mieux lutter contre l’habitat indigne. Elle a, par exemple, étendu les diagnostics déterminant la présence de nuisibles aux rats.
Et concernant la réforme de l’amiante ?
Les pouvoirs publics ont maintenant considéré que le repérage de l’amiante avant travaux ou démolition concernait tout le monde : les particuliers tout autant que entreprises et les institutions. Le rapport sur l’amiante avant la vente d’un bien ne s’appliquait jusque-là qu’aux matériaux accessibles. Or, il existe d’autres matériaux ou produits pouvant contenir de l’amiante, non listés lors du diagnostic vente. Ces derniers n’étant pas accessible sans réaliser de destructions, le risque d’exposition à l’amiante est nettement plus faible pour les occupants du logement.
Le particulier, s’il confie par exemple la rénovation de sa salle de bains à un professionnel du bâtiment, devra faire réaliser un diagnostic amiante avant-travaux spécifique à la zone concerné. Et s’il ne le confie pas directement à un diagnostiqueur immobilier, ce sera à l’entreprise en charge des travaux devra l’inclure dans son offre, d’autant plus que le propriétaire portera la responsabilité liée à ces travaux en matière d’amiante.
En 2019, quels seront les chantiers à l’agenda de la CDI FNAIM qui concernent les particuliers ?
Notre organisation professionnelle intervient régulièrement afin d’améliorer et promouvoir notre métier de diagnostiqueur, notamment auprès des pouvoirs publics et pour l’amélioration et la simplification des normes de repérages. 2019 sera une année très importante pour notre profession. Nous devons mieux évaluer la qualité du logement, qualifier leur décence avec l’apport des diagnostics immobiliers actuels et ainsi contribuer à une cause majeure : la lutte contre l’habitat indigne.
Pour que le confort du logement soit au rendez-vous, la qualité de l’air est devenue une exigence incontournable. Exemple caractéristique : la ventilation. Quand on supprime une cheminée ouverte et le simple vitrage, on crée des désordres dans le logement en matière de renouvellement de l’air.
Aérer le bien ne supprime pas l’humidité intérieure, laquelle génère moisissures, dégradations, développement de mérules ou encore concentration plus élevée du radon. La qualité de l’air d’un local est maintenant un challenge incontournable. Elle s’améliore grâce à une ventilation sanitaire efficace.
D’autres améliorations envisagées ?
Le confort d’un logement ne doit pas finir par rendre le lieu inconfortable. Par exemple, un bien trop isolé pour l’hiver peut engendrer une surchauffe à l’intérieur pendant la période estivale. Certains propriétaires, après avoir mis en place une bonne isolation thermique de leur bien… sont dans l’obligation d’installer une climatisation. Une analyse thermique du bien est à envisager préalablement à une rénovation. Le bâti ancien n’a pas été conçu pour être isolé, il est donc nécessaire d’être prudent avant d’effectuer des travaux.
On observe aussi aujourd’hui que les maisons neuves présentent un faible renouvellement de l’air intérieur. Dans ce type de biens, nous constations l’accroissement de moisissures, de traces d’humidité et de concentration du radon.
Ce gaz radioactif naturel, issu de la désintégration du radium et uranium, est situé principalement roches granitiques. Depuis le 1er juillet 2018, les pouvoirs publics conseille de surveiller sa teneur dans les logements situés plus particulièrement dans les communes à potentiels radon de zone 3, notamment situées en Bretagne, dans les Alpes, dans le Limousin…. La présence d’une forte concentration de ce gaz, inodore et indolore, accentue le risque du cancer du poumon avec les mêmes effets que le tabagisme passif. Une mise en garde est plus forte pour les fumeurs qui ont un risque beaucoup plus élevé. On invite désormais les particuliers concernés à acheter des capteurs de mesure du radon.
Le rôle du diagnostiqueur demeure d’intervenir afin d’établir un véritable état des lieux du logement. Evaluer les risques, informer de de la situation sanitaire, auditer ou expertiser le cas échéant le confort et l’accessibilité… ces constats sont réalisés pour permettre une meilleure qualité de vie dans l’habitat.
Comment observez-vous la progression de la profession de diagnostiqueur immobilier depuis la création de la CDI FNAIM en 2007 ?
Activité complémentaire à l’origine, le diagnostic immobilier s’est professionnalisé et est devenu un métier à part entière. De l’entreprise individuelle à la PME, plusieurs types de structures répondent à ce marché. Avec deux exigences principales : l’impartialité et une totale indépendance vis-à-vis de notre clientèle, dont les attentes sont qualité de la prestation, réactivité et proximité.
On voit cependant se dessiner trois catégories de diagnostiqueur, en fonction de leur expérience : le diagnostiqueur junior qui entre dans le métier et ne traite que les diagnostics vente et location, le diagnostiqueur averti, qui étend son activité aux repérages avant travaux ou démolition et aux spécialités comme le radon, et le diagnostiqueur expert, qui excelle dans son ou ses domaines d’activité en apportant vision et sérieux, et qui est un potentiel futur expert judiciaire.
Notre profession est strictement réglementée par la loi. Nous intervenons dans le cadre de la protection des personnes, pour la santé, la sécurité dans le logement, mais aussi vis-à-vis de l’impact des bâtiments sur notre environnement. Elle est parfois encore considérée comme des « empêcheurs de tourner en rond » par les vendeurs… et souvent plébiscitée par les acquéreurs, car nous mesurons la valeur foncière du bien et les risques sur la santé du propriétaire. Elle évolue aujourd’hui dans tous les domaines de l’expertise de l’immobilier, sans se positionner sur le terrain de l’expertise de la construction, avec prochainement la maquette numérique, la modélisation en BIM, ou encore l’évaluation globale du bâtiment à travers un DTG étendu à l’habitat. Le futur DPE est un outil de valorisation foncière du bien. Nous constatons déjà que la classe d’énergie, de A à G, influe sur le prix de vente d’un bien à hauteur de 5 % par classe. La valeur verte du logement commence à faire son chemin…
Enfin, début 2017, l’arrivée de l’intégralité d’une centaine de franchisés Diagamter au sein de la CDI FNAIM, un réseau sérieux avec lequel nous partageons la même vision du métier et de l’approche du client, nous a apporté plus de lisibilité et de crédibilité auprès des pouvoirs publics. Si chaque structure franchisée de l’enseigne est indépendante, j’ai vraiment retrouvé au sein de ce réseau, et notamment lors de sa dernière Convention nationale, un esprit de famille et une bienveillance comme il en existe au sein de toute l’institution FNAIM
[1] A partir de 2020 dans le neuf, et de 2025 dans l’existant à l’occasion d’une mutation